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Rendez-vous avec des humanoïdes
Pièces de théâtre, séries télévisés, les robots entrent en scène
David Lacombled, président de La villa numeris, a apprécié la pièce de théâtre de Joël Pommerat dans laquelle il voit la préfiguration d’un monde où les robots vont monter en puissance.
Delphine Sabattier, journaliste: Aujourd'hui on part au théâtre. Vous nous emmenez voir Contes et légendes de Joël Pommerat qui met en scène des humanoïdes.
David Lacombled: Exactement. La pièce s'est terminée il y a quelques jours. Il s’agit d’un exercice d'anticipation. Vous me direz, c'est l'art d'être en avance sur son temps, même si là, on est sur un exercice d'anthropologie à la rencontre d'humanoïdes. Ils sont qualifiés comme tels sur scène, ils ont la spécificité d'être des serviteurs, des serviteurs, des humains qu’ils leur fasse les courses, qu'ils gardent leurs enfants. Et d'ailleurs, ils font un peu peur aux adolescents parce qu'ils sont étranges. Ils sont à leur image aussi, moins réels et un peu plus stroboscopiques. C'est drôle, c'est émouvant, c'est bien dirigé, c'est bien joué. Avec une pièce qui a été créée avant l'avènement des IA générative et qui a donc été remise au jour à cette aune-là. Et effectivement, c'est un bon spectacle.
Delphine Sabattier: Et alors, quels enseignements en tirez-vous?
David Lacombled: C'est l'annonce en quelque sorte de ce qui pourrait arriver dans des pays occidentaux comme le nôtre, des pays vieillissants, avec de la main d'œuvre qui va se faire rare et où finalement les machines pourraient devenir de parfaits auxiliaires de vie. Regardez ce qui se passe au Japon, avec 30 ans d'avance sur ce qui pourrait très bien arriver en Europe. Avec des robots ne sont jamais aussi bons que lorsqu'ils sont interprétés par des humains. C'est le cas sur scène et ça me rappelle d'ailleurs ces humanoïdes que l'on voyait dans la série Real Humans 100 % humains, qui avait été diffusée en 2012 sur Arte avec quelques biais. Il faudrait avoir les cheveux blonds, la mèche sur le côté et la raie quand on est un robot.
Ça me rappelle aussi le Turc mécanique. Je ne sais pas si vous vous souvenez de cette machine, de cet automate. L'automate est l'ancêtre du robot. Il jouait aux échecs et il y avait un humain caché en dessous. Il a été détruit dans un incendie. Depuis, il y a eu une réplique avec un logiciel qui cette fois-ci joue très bien aux échecs d'ailleurs. Et on a vu depuis que les IA savaient faire des prouesses. Souvenez-vous du match Garry Kasparov xontre Deep Blue dans les années 90, où le maître d'échecs avait gagné certes le match aller, mais c'est bien la machine qui avait gagné le match retour. Et des Turcs mécaniques, on en a vu quand même beaucoup en matière numérique. Songez d'ailleurs aux fermes à clics ou à trolls et qui viennent saper l'opinion et truander en quelque sorte les audiences.
Delphine Sabattier: Alors on a accepté cette partie d'intelligence logicielle. On n'a pas encore basculé totalement dans un monde d'humanoïdes.
David Lacombled: Non, parce que si Dieu a fait l'homme à son image, l'être humain qui est finalement le Dieu du siècle numérique, qui commence à peine, est en train de créer le robot à sa propre image, avec là aussi quelques biais, me semble-t-il.
Delphine Sabattier: Quels biais ? Expliquez-nous.
David Lacombled: Des biais d'automatisation qui font qu'on a plutôt tendance à avoir une confiance exagérée dans la machine. On en a déjà parlé sur ce plateau, on est un jour férié. Je sais bien que le magasin au coin de la rue est fermé, mais pourtant mon moteur de recherche me dit qu'il est ouvert et je vais quand même au magasin. Ça peut prêter à sourire. Il y a eu des exemples plus dramatiques de personnes qui ont cru mordicus que leur GPS et qui se sont retrouvés dans des sables mouvants. Et effectivement, il y a une certaine dépendance, ne serait-ce qu'à nos téléphones mobiles, de véritables doudous numériques, qui nous offrent une image telle un miroir non pas de ce que l'on est, mais de ce qu'on aimerait y voir.
Delphine Sabattier: Parce qu'on s'attache aux machines.
David Lacombled: Oui, on s'attache et c'est un peu troublant quand même. Moi je me souviens d'enfants qui embrassaient leur Nabaztag, ces petits lapins dans les entrées des foyers? Mais regardez vos promptes, comment vous leur parlez? Est-ce que vous voulez, vous? Voyez-vous les tutoyer? Est-ce que vous donnez des noms? Ok, Google, de rien, Ça c'est pour ceux qui ont un appareil. Dites-moi comment je vous parle et je vous en dirai un peu plus sur le taux et le niveau d'humanité que vous mettez dans votre machine. Qui dit humanité dit droit. Et donc demain, ce qu'il va falloir créer un droit spécifique pour les robots. On a déjà des candidats à la présidentielle qui avaient bien voulu les taxer. Mais effectivement, certainement. Demain, y aura t-il des droits associés à des robots? Comme il y a déjà des droits associés aux entreprises par exemple, qui ont une personnalité morale indépendante de celle des humains.
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