#DigitalTrends eSanté Choc informationnel

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Table-ronde #2 du 10 mars 2021 | Compte-rendu | Replay vidéo 

Une nécessaire confiance

Matin, midi et soir. A la une de tous les journaux, dans toutes les discussions. L’espace informationnel est saturée par la crise sanitaire. 

Avec la crise sanitaire, le récit de la santé et du numérique a été erratique. La parole scientifique s’est retrouvée défiée, les informations souvent manipulées sur un terrain qui était favorable. Lors de ce deuxième rendez-vous consacré à la e-santé, La villa numeris, avec l’expertise des grands témoins, a tenu à reprendre le fil de ce récit afin de restaurer une confiance entre santé et citoyens.

Infodémie

« En relisant les message échangés avec mes collègues au début de l’année 2020, je me rends compte que personne n’avait anticipé la déferlante d’intox », constate Chine Labbé, rédactrice en chef Europe de NewsGuard. Evaluant la fiabilité des sources d’information en ligne, elle souligne ce « nouveau phénomène », « l’infodémie », rassemblant « information » et « épidémie ». Face à celui-ci, elle note la « nécessité d’être préparé et de s’outiller en amont ». Chine Labbé revient sur ce glissement progressif, à l’image de « la trajectoire » du site internet « France Soir ». 

David Petauton, directeur de la communication de l’Agence pour le numérique en santé note un paradoxe ; « dans un monde complètement à l’arrêt, le numérique s’est accéléré. Tout s’est emballé très vite ». « La demande d’information a explosé » se souvient David Lacombled. Aussi, David Petauton le confirme : « on n’avait pas prévu toute l’explosion des réseaux d’information. C’était un tsunami informationnel ». Il rappelle que « nous avions beau nous préparer à la crise, nous n’étions pas prêts. Nous avons combattu un ennemi invisible », le Covid-19. Cyrille Politi, délégué régional adjoint Bourgogne Franche-Comté de la Fédération Hospitalière relève les différentes temporalités de la crise sanitaire. Il revient sur « le premier temps de sidération » lorsque le virus s’est imposé en Italie et que les patients français étaient très concentrés géographiquement. 

« Les attentes de savoir étaient fortes » considère Cyrille Politi. Puis, « avec les chaines d’information en continu, les réseaux sociaux et les sujets autour de la méthodologie », s’est alors installée « une communication très binaire ». Pour David Réguer, PDG de RCA Factory, agence digitale de communication spécialisée en santé, « les fausses informations sont relayées en toute connaissance de cause ». David Réguer explique la démarche adoptées par ceux qui les diffusent : « peu importe la véracité de l’information, ce qui compte, c’est ce que je défends ».  Pour lui, l’un des symboles est bien Donald Trump. 

Le temps de la science face au temps des réseaux sociaux 

Peu à peu se sont installés dans le paysage médiatique en raison de la crise, des noms, dans la pharma, qui n’étaient pas inscrits pour le grand public », ce qui démontre « une capacité d’innovation » souligne David Réguer. Il revient sur cette « longue crise très difficile à séquencer ». Il relève que s’est instaurée, « progressivement, davantage d’humilité par rapport à la gestion de crise ». 

« La science qui vit sur un temps long a du mal à cohabiter sur les réseaux sociaux » explique Chine Labbé. Effectivement, ont été mis au grand jour, des désaccords de scientifiques ou encore des discussions sur des pré-études, « un processus sain ». Elle explique que « le consensus scientifique met du temps à se construire ».  Or, « des gens non experts se sont autorisés à se saisir de ce sujet et à mésinterpréter». Elle note qu’ « il reste de 2020 une ambivalence »: d'un côté des médecins détestés, et de l’autre des scientifiques adulés, avec l’exemple des menaces de mort reçues par Karine Lacombe et la valorisation de Didier Raoult. Chine Labbé rappelle que la France est « un pays très sceptique et que la suspicion envers l’industrie pharmaceutique existe de longue date ».

Face à ce domaine qui exige du temps long, a émergé « un sentiment d’encombrement » explique David Lacombled soulignant « l’assourdissement sur un terrain de jeu propice à la diffusion de la manipulation de l’information ». Ainsi, David Réguer considère que « l’on ne peut pas rester que dans le registre rationnel avec des fact-checkings, alors qu’en face il y a de l’ émotionnel ». 

Formation et outils

Le collectif est de mise. « Les éléments de langage se construisent ensemble », explique Cyrille Politi, Délégué régional adjoint Bourgogne Franche-Comté de la Fédération Hospitalière. La communication est, ici, institutionnelle. « En tant que fédération, on représente des structures publiques. On parle au nom de ces structures. On s’inscrit dans la ligne de ce qui est décidé au niveau national » explique-t-il. Après les concertations entre les ministères, « quand les décisions sont prises, on les applique ». La pédagogie est nécessaire, en témoigne le nombre de recherches sur Google au sujet du Covid-19. « Environ 20 millions par mois en France et 185 millions dans le monde », sur la seule requête « Coronavirus », explique David Réguer précisant que « les plateformes sont bâties pour des réactions immédiates ». 

« Il faut aider les internautes à se retrouver et à faire le tri » explique Chine Labbé considérant qu’ « il faut surveiller tout ce qui se fait : les intox voyagent très vite ». Afin d’aider les internautes à se repérer, NewsGuard a créé un outil spécifique dédié à la santé, HealthGuard. Le risque est bien là sinon d’avoir « une incidence sur la vaccination ». La transparence est nécessaire de la part des parties prenantes : « la pharma, les médecins, les journalistes ». Pour elle, il convient de « s’adresser aussi aux employés et aux personnels de santé ». Ainsi, David Petauton le confirme avec sa sentence : « fini la com, vive la formation ! » Selon lui, il s’agit de  « doter chacun de la capacité de prendre de la hauteur ».  Pour Cyrille Politi, « il faut intéresser le plus grand nombre à la science ». Il se rappelle ses jeunes années, où la science était à la télévision « à l’heure de grande écoute ». 

En mobilisant et en formant davantage les internautes et les citoyens pour qu’ils soient avertis et aiguisent leur regard avec distance, cela permettra de retisser ce lien de confiance dans l’espace informationnel. 

:: VaxFacts. NewsGuard, une société qui lutte contre la mésinformation en évaluant la fiabilité des sites d'actualité et d'information et en alertant les internautes sur les sites d'intox, a lancé la campagne VaxFacts, pour lutter contre les intox sur les vaccins, afin qu'elles ne viennent pas polluer les campagnes vaccinales contre le COVID-19 >> Découvrir

//. Nos grands témoins :

Chine Labbé

Rédactrice en chef Europe, NewsGuard

David Petauton

Directeur de la communication de l’Agence pour le numérique en santé

David Réguer

PDG de RCA Factory, agence digitale communication santé

Cyrille Politi

Délégué régional adjoint Bourgogne Franche-Comté de la Fédération Hospitalière

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